Le Gouvernement a installé la Commission Guinchard le 18 janvier 2008 qui était un groupe de travail chargé de réfléchir à une nouvelle répartition des contentieux et donc à la réforme de la procédure et de l’organisation judiciaire aux fins de simplification. Sa présidence a été confiée au Recteur Serge Guinchard, professeur de droit d’où le nom de la Commission. Le rapport de la commission a été rendu le 30 juin 2008 après de multiples auditions des professionnels, experts et usagers. Le rapport Guinchard comprend 65 propositions : – 23 propositions en matière d’organisation judiciaire (n° 1 à 23) ; – 8 propositions en matière d’accès à la justice et de procédure (n° 24 à 31) ; – 34 propositions en matière de déjudiciarisation et d’allégement procédural (n° 32 à 65) dont certaines concernent les modes alternatifs des conflits avec une réorganisation de la conciliation et médiation et la création de la procédure participative de négociation assistée par avocat. Les travaux Guinchard se sont largement inspirés du modèle américain pour cette procédure dite participative assistée par avocats. Sans doute a t-on voulu éviter le mot collaboratif et de parler de collaboration, terme qui en Europe est mal perçu depuis la seconde guerre mondiale. La proposition 47 est ainsi rédigée : <<47) Création d'une nouvelle procédure de règlement amiable des litiges : la procédure participative de négociation assistée par avocat. Cette procédure devrait permettre de faciliter le règlement amiable des litiges, sous l'impulsion des avocats ; en cas d'échec partiel ou total de la négociation, une passerelle vers la saisine simplifiée de la juridiction permet un traitement accéléré de l'affaire (observations et pièces des parties figurant dans l'acte de saisine). >> C’est cette proposition qui est bien à l’origine de la loi n°2010-1609 du 22 décembre 2010 (JO du 23 décembre) relative à l’exécution des décisions de justice, aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires. Elle est entrée en vigueur dès le 1er septembre 2011 même si nous n’avons pas encore le décret d’application. L’article 37 intègre dans notre droit « la convention de procédure participative » avec l’insertion d’un nouveau titre XVII au code civil intitulé « de la convention de procédure participative » comprenant les articles 2062 à 2068 dans le code civil avec la reprise des suggestions du rapport Guinchard. Les principaux points à en retenir en sont que la convention de procédure participative est conclue avec le cadre et limites suivantes :  Un litige existant avant saisine d’un juge ou d’un arbitre :  Une durée déterminée  à peine de nullité, c’est un écrit qui précise * son terme : * l’objet du litige * les pièces nécessaires et les modalités de leur échange  nul ne peut s’il n’est avocat assister une partie  toutes les matières dont les parties ont la libre disposition à l’exception du droit du travail  interdiction de saisir un juge pendant la durée déterminée sauf * mesures conservatoires ou urgentes * inexécution par une partie de la convention avec dispense de la phase de conciliation ou de médiation  la prescription est suspendue comme en matière de médiation pour une durée de 6 mois ( à compter de la conclusion de la convention et le délai de prescription recommence à courir à compter du terme de la convention) Enfin, les articles 10 et 39 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle sont modifiés pour permettre qu’elle couvre la procédure participative à l’instar de la transaction. En conclusion, on peut dire que cette possibilité de conclure une convention de procédure participative en toutes matières à l’exception pour le moment du droit du travail est un nouvel outil au service des avocats qui doivent pouvoir se l’approprier. Pour cela, il faut se former non seulement au cadre légal mais aussi au contenu, c’est-à-dire à l’apprentissage des techniques de négociation raisonnée que cette pratique requiert. La loi n°2011-331 du 28 mars 2011 qui institutionnalise l’acte d’avocat renforcera d’autant plus la valeur de la convention passée puisqu’un acte sous seing privé reconnu a, aux termes mêmes de l’article 1322 du code civil, entre ceux qui l’ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause, la même foi que l’acte authentique. Et si tous les avocats ne seront pas collaboratifs, ils doivent tous au moins recevoir une formation de base car ils engagent leur responsabilité sur leur devoir de conseil vis-à-vis de leurs clients. Cependant, la loi française se distingue des standards internationaux en la matière puisque nous n’avons pas en tant qu’avocat d’obligation de retrait en cas d’échec qui nous interdise de poursuivre l’affaire devant les tribunaux. C’est assez choquant car tout l’engagement et le sens de la pratique collaborative est de tendre vers le seul objectif de résoudre cette affaire amiablement en toute confidentialité ou de se démettre. Les avocats collaboratifs français qui ont adhéré à l’IACP (académie internationale des professionnels collaboratifs) se sont déjà engagés dans l’application de ses standards qui exigent un engagement ferme de leur part de ne pas poursuivre l’affaire judiciairement en cas d’échec. Il est vrai aussi que cette loi n’encourage pas non plus le droit de suite directement qui ferait de la procédure participative un moyen dilatoire ou un préalable à la procédure judiciaire et la décrédibiliserait. Ce n’est pas l’objectif poursuivi mais l’absence de précision semble dire que toutes les parties et donc les avocats, puisqu’ils sont signataires, peuvent le faire. On peut imaginer que la pratique fera évoluer la législation en ce sens ou que même le décret d’application attendu permettra de préciser ce qu’est une pratique collaborative ou participative de ce qui ne l’est pas et les conditions d’exercice des professionnels pour conclure une convention participative. Toute l’originalité du droit collaboratif, est de pouvoir travailler en équipe constituée des personnes en litige assistées de leurs avocats mais également différents autres experts, laquelle équipe s’engage clairement sur les principes de base posés par l’IACP qui imposent le retrait en cas d’échec. Travaillons ensemble, unissons nos compétences pour mieux servir nos clients !