C’est un vaste débat qui mérite attention. Il a été évoqué lors d’une émission télévisée sur la chaîne parlementaire LCP en mai dernier auxquels ont participé le médiateur de la République et deux députées du Haut-Rhin et du Finistère. Je ne peux que remercier un confrère très sympathique de Beauvais, lecteur de ce blog, qui se reconnaîtra discrètement, pour m’en avoir parlé cette semaine car l’émission est même repassée ce dimanche. Je vous conseille de l’écouter. Elle dure près de 28mn et se termine par un court reportage sur la saisine du Médiateur de la République. Vous trouverez ci-joint le lien sur la vidéo de la chaîne ici. Cette émission fait assez bien le tour de la question à quelques erreurs près comme de sembler dire que c’est la CAF qui finance exclusivement la médiation familiale ou que la prise en charge est assurée alors que tous les justiciables n’ont pas l’AJ et ne s’adressent pas non plus à une association subventionnée par la CAF. En ce qui concerne les avocats, on évite difficilement les poncifs dans le reportage outre une erreur fondamentale qui est de dire que les médiations se déroulent hors la présence des avocats alors qu’ils peuvent parfaitement y assister mais Jean-Paul Delevoye, médiateur de la République, corrige ensuite ce point tout comme celui de dissocier les « avocats de la médiation » des avocats qui sont devenus des médiateurs (hors leurs dossiers d’avocat évidemment). Ils doivent dans tous les cas suivre leur client en debriefing. C’est en tout cas ce que je préconise pour être sûre que la médiation se déroule normalement sans pression et comme le dit très bien le médiateur du reportage en laissant aussi le temps aux médiés d’aller consulter tout professionnel dont avocat car ce qui est visé, c’est bien la pérennité de l’accord. A cet égard, une autre correction me semble devoir être apportée: on ne revient pas voir le médiateur à la moindre difficulté personnelle, ce n’est pas une thérapie familiale. Il y a des professionnels pour cela. La médiation ne concerne que les cas de rupture avec le besoin de maintenir le lien avec l’autre. Certes, les acteurs du débat recadrent pour expliquer que les avocats dans leur rôle strict d’avocat sont là pour conseiller leurs clients et les défendre. C’est essentiellement quand ces médiations négligent trop les aspects et conséquences juridiques qu’ils sont réticents car bien souvent, on ne leur permet pas de faire leur travail. On rappellera qu’un avocat au-delà de la conscience professionnelle d’avoir pu mettre en oeuvre tous moyens pour un travail de qualité dans le conseil (et pas d’ailleurs dans l’optique exclusive d’entretenir le conflit contrairement aux idées reçues même dans un cadre judiciaire) engage également sa responsabilité civile professionnelle. Il est vrai aussi que viendra le jour où la responsabilité des médiateurs indépendants sera engagée s’ils commettent des fautes comme de dire à une partie qu’elle ne doit pas aller voir son avocat; ce qui n’est pas une hypothèse d’école. En tout cas, le pire est à craindre quant aux intentions du médiateur qui dit cela. Enfin, il est relevé qu’il y a des avocats qui continueront à préférer le contentieux que la pratique des modes alternatifs de réglement des conflits. C’est vrai et il faut le savoir clairement. Quant à rendre la médiation obligatoire, il y avait un consensus pour le oui. Lors de l’émission, on a pu louer les présidents des tribunaux qui vont en ce sens. Je suis beaucoup plus réservée sur le sujet car d’abord, il faut savoir ce que l’on entend par « obligatoire ». On ne peut en aucun cas forcer les parties à aller en médiation. On ne passe pas un accord contre son gré soit il celui d’aller en médiation. La démarche doit rester un processus volontaire. En revanche, il est évident qu’avant de dire non, il faut être informé valablement. L’information doit être obligatoire. Il y a une méconnaissance évidente du processus de médiation et de tout ce qu’il peut apporter. Comme au Québec et parce qu’il y a une réelle prise en charge financière là-bas, il faut un minimum expliquer pourquoi ce n’est pas possible. Il y a des cas qui justifient un refus légitime qui doit être entendu préalablement. Bien sûr, le médiateur est sensé s’assurer de la possibilité de poursuivre un processus de médiation mais cela devient plus compliqué quand le juge a imposé dans son propos la médiation. Cela peut avoir l’effet inverse de celui attendu. Ce n’est pas leur rôle que d’imposer quoi que ce soit à ce stade de la procédure. Simplement, un minimum d’explications s’impose pour comprendre accord ou refus d’aller en médiation et apprécier le niveau d’information suffisant. C’est pourquoi, ils ont un pouvoir d’injonction quant à la séance d’information. Il m’apparait quant à moi que si l’avocat a bien fait son travail, le client doit être informé. Les avocats doivent se former valablement pour eux-mêmes pouvoir informer. Ce n’est pas encore le cas à ce jour même si dans les grandes villes, le processus est en marche. Restent ceux qui comparaissent sans avocat et qui sont perdus, ils peuvent refuser par méconnaissance. Cela se voit bien souvent et la séance obligatoire d’information est importante pour se décider. Sous réserves que cette séance soit financée, il n’y a aucune raison que le médiateur qui informe ait un droit de suite obligatoire; les parties doivent pouvoir le décider librement et ultérieurement. A cet égard, je suis contre l’idée que l’acceptation doit se faire à ladite séance. Il faut laisser le temps de la réflexion, de la consultation d’autres professionnels. Enfin, outre les personnes qui ont besoin de thérapie plus que de médiation, il y a aussi ceux qui vont utiliser la médiation pour faire durer la procédure au détriment du premier; ce qui peut être extrêmement préjudiciable. Dès lors, il faut être prudent, la médiation n’est pas la panacée universelle et le sera encore moins si on la force. Il m’apparaît aberrant d’entendre que dans un tribunal qui a fait couler plus d’encre à tout le moins ces dernières années qu’Alphonse Daudet sur le vrai héros des lieux, on puisse se vanter qu’il n’y avait plus avant la réforme sur le divorce de procédure autre qu’amiable. Quand il y a des fautes, elles doivent être entendues, reconnues et pas seulement en médiation. C’est aussi un droit qui n’a pas à être bafoué quand on veut l’exercer. Il y a des limites à tout aussi dans ces excès là. La médiation, c’est rechercher un équilibre mais ce sont aux personnes qui vont en médiation de le trouver. Pour ce faire, l’entrée en médiation est aussi importante que la sortie de médiation.
Articles récents
- La poursuite de l’intégration judiciaire de la médiation et de la procédure participative assistée par avocats
- La refonte partielle du code de procédure civile
- Un nouveau métier de médiateur social accès droits et services en suspens
- Le Québec institutionnalise la journée nationale de la justice participative
- Le vrai et seul site des avocats français
Catégories
Étiquettes
ADPCI
aide juridictionnelle
Arbitrage
Autres médiations
Avocats
Conciliation
Droit collaboratif
droit de la famille
mediation
mediation civile
mediation civile et commerciale
mediation commerciale
mediation familiale
mediation institutionnelle
mediation internationale
mediation judiciaire
mediation pénale
mediation sociale
médiateurs
Procédure civile
procédure participative
Archives
L | M | M | J | V | S | D |
---|---|---|---|---|---|---|
1 | ||||||
2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 |
9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 |
16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 |
23 | 24 | 25 | 26 | 27 | 28 | 29 |
30 | 31 |