Le 5 juillet, Monsieur YAZID SABEG Commissaire à la Diversité et à l’Egalité des chances s’est livré à un réquisitoire sur « liberation.fr » ici intitulé « il est urgent de réformer la Halde » qui intervient dans un contexte où celle-ci est déjà fragilisée puisque son maintien comme institution est fortement controversé, ses actions de lutte contre les discriminations pouvant être rattachées au nouveau défenseur des droits à l’instar d’autres institutions comme la défenseure des enfants. Et c’est une véritable charge à boulets rouges contre la Halde qui est exprimée sur cette tribune libre tant le propos est vif puisqu’en résumé, il estime que l’approche globale des discriminations sous tous ses aspects âge, sexe, handicap, orientation sexuelle, origine… n’est pas la bonne car elle conduirait à une dilution des efforts. Pour lui, « Chaque type de discrimination doit ensuite avoir un mode de traitement adapté : le choix pourrait être fait – et le geste politique serait fort – de dédier la Halde à la lutte contre les discriminations ethniques. » Puis, il la fustige au nom d’un manque de transparence de ses opérations et s’attaque au fait que la Halde a mis en avant le recours à la médiation. Laissons le poursuivre : <<..La médiation permet de renouer le dialogue entre des adversaires, par exemple en cas de divorce complexe. Appliquée à la discrimination, la médiation permet de négocier en toute confidentialité une indemnisation pour le discriminé sans entacher la réputation du discriminant. Ce genre de négociations n'a pas l'effet dissuasif de la sanction publique. Loin de s'appuyer sur les pôles antidiscrimination des tribunaux, la Halde a choisi de recourir à la transaction pénale. Cette forme de «plaider coupable» menée loin des prétoires vide encore un peu plus la règle pénale de sa portée véritable, alors qu'elle est l'instrument fondamental de sanction des comportements fautifs. Souvenons-nous des condamnations exemplaires prononcées contre L'Oréal ou le Moulin rouge : les progrès décisifs du droit sont toujours le fait d'affaires pénales tranchées par nos tribunaux au nom du peuple français, pas dans des réunions privées...>>. Liminairement, il est alarmant de considérer qu’il y aurait une hiérarchie des normes de la bêtise humaine en matière de discrimination et que la discrimination ethnique serait plus importante que d’autres, on peut se demander ce que doit faire une femme d’origine juive (ou musulmane), étrangère, homosexuelle noire, de + 50 ans avec un handicap physique qui se plaindrait de discriminations dans l’exercice de son travail liées à l’accumulation des motifs de discriminer. Ce n’est pas une hypothèse d’école car tout ce qui est minoritaire ou cru comme tel est discriminé par la loi du plus fort. Cette préconisation est surtout violemment discriminante pour chacune des autres discriminations. Elle est en cela hautement condamnable et ne correspond pas à la valeur d’égalité des chances qui est la mission du commissaire. En ce qui concerne la médiation proprement dite, il est parfaitement faux de considérer qu’il s’agisse d’une négociation sur position en vue d’un paiement sauf à n’avoir rien compris à ce que la médiation signifie et à ce que la médiation de la Halde est sensée être car elle affiche une spécificité propre. Elle n’est pas neutre en ce qu’il n’est pas possible de composer avec les dispositions d’Ordre public qui répriment les discriminations. Elle a seulement un objectif pédagogique reconnu en matière de discrimination parce que condamner est parfaitement insuffisant en la matière. La discrimination n’est pas pour reprendre un exemple cher au commissaire aussi aisée à repérer qu’une injure raciale entendue comme telle. C’est souvent plus sournois parfois même inconscient. Ex : un boulanger installé dans un quartier dit « select » ( !) qui répond en médiation : « ah non,je ne suis pas raciste, j’ai même des noirs dans ma famille mais vous comprenez, ma clientèle n’aurait pas compris et déserté mon magasin, je suis obligé d’en tenir compte…. » Si la victime a besoin que justice puisse lui être rendue, cela ne passe pas uniquement par la case tribunal car la condamnation du discriminant qui est l’application stricte de la règle de droit n’a pas de valeur pédagogique approfondie : la crainte ou l’application de la sanction n’empêche pas de penser différemment. Comprendre que le droit dicte une autre conduite ne change rien à l’etat d’esprit qui provoque ces situations. Comprendre pourquoi il y a eu discrimination, c’est s’attaquer à la source. Eradiquer le phénomène prend sens pas seulement pour le discriminant mais pour la société prise dans son ensemble. En matière de discrimination, il faut une approche plus approfondie qui ne fera surtout jamais réitérer un comportement discriminant parce qu’il a été compris dans tous ses aspects et conséquences. Il ne faut pas céder sous le feu des assocaiations militantzq par nature dans n’importe quelles cinfitions (voir ici ) Le progrès du droit, c’est aussi de passer par des méthodes alternatives plus definitives dans le traitement de la discrimination qu’une condamnation de principe sans chercher à comprendre et en laissant le discriminant à ses certitudes. Et puis, c’est à celui qui subit de choisir ce qu’il convient d’entreprendre. Il est libre d’aller en médiation ou de la refuser. Il a besoin d’etre entendu et de se faire entendre. Un procès ne lui donne la parole que pour mieux qualifier l’infraction. L’écoute ne peut être rapide et s’arrêter aux faits bruts. Enfin et surtout, la médiation est une tentative qui n’est pas proposée dans tous les cas loin s’en faut et n’exclue pas du tout le procès. Alors d’où viennent ces affirmations surprenantes de la part du commissaire ? A bien y rechercher, le paradoxe est que cela vient à mon sens de la communication un peu maladroite de la Halde qui a laissé entendre qu’elle privilégiait la médiation si la discrimination n’était pas avérée. Ainsi sur sa page d’accueil, on peut lire que la mission de la Halde est la suivante: << Elle aide toute personne à identifier les pratiques discriminatoires, et à les combattre. Elle conseille pour les démarches juridiques, et contribue à établir la preuve de la discrimination. Elle peut se saisir elle-même de toute pratique discriminatoire dont elle a connaissance. Elle dispose de pouvoirs d'investigation pour instruire les dossiers. Elle peut exiger des documents et des preuves que la victime n'a pas pu obtenir, aller vérifier sur place et entendre des témoins. La HALDE aide à trouver une réponse adaptée : * organiser une médiation pour trouver un accord ou saisir le procureur de la République en cas de discrimination avérée, * obtenir une indemnisation, proposer une amende à celui qui a discriminé et déclencher un procès s'il refuse de les verser (transaction pénale), * intervenir devant le juge si la victime décide d'aller au tribunal, * rendre publique une pratique de discrimination. La HALDE émet des avis et des recommandations, auprès du gouvernement, du Parlement et des autorités publiques pour lutter contre les discriminations, afin d'améliorer les textes de loi, de faire progresser l'état du droit français dans ce domaine.>> Quand on voit les résultats de son dernier bilan déjà commentés ici, on ne peut que se rendre compte que c’est un effet d’annonce. La médiation par la Halde qui a défrayé la chronique par ses détracteurs, souvent animés de vengeance aveugle pour une valeur d’exemple discutable , n’est pas en réalité dans les faits l’outil privilégié réel de la HALDE. Mais alors, est ce à dire que la majeure partie des cas soumis est poursuivie pénalement purement et simplement ? Ce n’est pas sûr à lire les résultats. Au regard des moyens dont dispose la Halde en budget, on est en droit de s’interroger sur ses actions : la médiation est elle alors un outil médiatique plus qu’une réalité ? Après avoir agréé un certain nombre de médiateurs, il a été mis fin à la procédure de marché public sans la moindre explication. La Halde n’a pas jugé utile de se justifier auprès des médiateurs qui doivent se contenter d’avoir eu un agrément resté vain. On est loin des centaines de cas qui devaient nous être soumis ou alors la médiation est elle si confidentielle ?! A qui est elle confiée ? Le traitement des plaintes ou les saisines de la Halde restent opaques. Tout ce qui brille n’est pas or. Les communications médiatiques ont nui à l’institution et par voie de conséquence à la médiation puisque dans l’opinion, la Halde s’est servie de la médiation au point de passer pour une « fashion victim » de celle-ci. De là au syllogisme : la médiation, vous le voyez est un échec, il n’y a pas loin. Faudrait il qu’elle ne soit surtout pas qu’un vain mot et là, on finit par rejoindre le commissaire sur la question du maintien de la Halde en tant qu’entité indépendante dotée de son budget propre car la médiation n’est elle pas l’arlésienne de la Halde ?!
La condamnation doublement injustifiée de la pratique de la médiation par La Halde
12,07,10 | ADR blog de la médiation | 0 commentaires