Qu’est-ce que la médiation pénale ?
Dans le cadre de son pouvoir d’appréciation de l’opportunité des poursuites, le procureur de la République peut mettre en oeuvre certaines mesures alternatives.
Ces mesures doivent être proposées préalablement à la décision d’exercer l’action publique et pour objet de mettre fin au trouble résultant de l’infraction, d’assurer la réparation du dommage causé à la victime et de contribuer au reclassement de l’auteur des faits.
Il y en a un certain nombre en fonction de la gravité des faits reprochés dont la médiation pénale qui est prévue à l’article 41-1-5 du code de procédure pénale qui dispose:
<<5° Faire procéder, à la demande ou avec l’accord de la victime, à une mission de médiation entre l’auteur des faits et la victime. En cas de réussite de la médiation, le procureur de la République ou le médiateur du procureur de la République en dresse procès-verbal, qui est signé par lui-même et par les parties, et dont une copie leur est remise ; si l’auteur des faits s’est engagé à verser des dommages et intérêts à la victime, celle-ci peut, au vu de ce procès-verbal, en demander le recouvrement suivant la procédure d’injonction de payer, conformément aux règles prévues par le code de procédure civile. La victime est présumée ne pas consentir à la médiation pénale lorsqu’elle a saisi le juge aux affaires familiales en application de l’article 515-9 du code civil en raison de violences commises par son conjoint, son concubin ou le partenaire avec lequel elle est liée par un pacte civil de solidarité ;
…..
La procédure prévue au présent article suspend la prescription de l’action publique.
En cas de non-exécution de la mesure en raison du comportement de l’auteur des faits, le procureur de la République, sauf élément nouveau, met en oeuvre une composition pénale ou engage des poursuites.>>
La composition pénale se traduit la plupart du temps par une amende, la remise d’un permis détenu (conduire, chasse etc) et/ou la suivi d’un stage à ses frais etc..
Comme il peut s’observer la médiation pénale n’est pas définie en tant que telle par la loi. C’est à la partie réglementaire que la médiation pénale est plus définie par ceux qui l’exercent à savoir les « délégués et les médiateurs du procureur de la République »
(Article R15-33-30 à 15-33-37).
Aux termes de ces dispositions, il faut simplement que les personnes physiques ainsi que les associations régulièrement déclarées se fassent habiliter comme délégués du procureur de la République pour être chargées d’une des missions prévues par les 1° à 4° de l’article 41-1 ou pour intervenir lors de la procédure de composition pénale prévue par les articles 41-2 et 41-3 ou comme médiateurs du procureur de la République dans les conditions prévues par la présente section pour effectuer une mission de médiation conformément aux dispositions du 5° de l’article 41-1. La réglement précise qu’elles peuvent être les mêmes.
Le médiateur pénal est donc un délégué du procureur et rien qu’en cela n’est ni neutre, ni indépendant.
Comment devient-on médiateur pénal ?
La personne physique ou morale selon qu’elle désire être habilitée dans le ressort du tribunal de grande instance ou dans celui de la cour d’appel en fait la demande au procureur de la République ou au procureur général.
La demande présentée par une association comporte notamment :
1° La copie du Journal officiel portant publication de la déclaration de l’association ou, en ce qui concerne les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin ou de la Moselle, une copie de l’extrait du registre des associations du tribunal d’instance ;
2° Un exemplaire des statuts et, s’il y a lieu, du règlement intérieur ;
3° La liste des établissements de l’association avec indication de leur siège ;
4° Un exposé indiquant les conditions de fonctionnement de l’association et, le cas échéant, l’organisation et les conditions de fonctionnement des comités locaux ainsi que leurs rapports avec l’association ;
5° La mention des nom, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité, profession et domicile des membres du conseil d’administration et du bureau de l’association ainsi que, le cas échéant, ceux de ses représentants locaux ;
6° Les pièces financières qui doivent comprendre les comptes du dernier exercice, le budget de l’exercice courant et un bilan ou état de l’actif mobilier et immobilier et du passif ;
7° La liste des personnes physiques qui, au sein de l’association, doivent accomplir les missions qui lui sont confiées, avec la mention des nom, prénoms, date et lieu de naissance, nationalité, profession et domicile de chacune d’entre elles.
Le Médiateur ou du délégué du procureur de la République doit satisfaire aux conditions suivantes :
1° Ne pas exercer de fonctions judiciaires ou participer au fonctionnement du service de la justice ou être investi d’un mandat électif dans le ressort de la cour d’appel ;
2° Ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation, incapacité ou déchéance mentionnée sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire ;
3° Présenter des garanties de compétence, d’indépendance et d’impartialité ;
4° Ne pas être âgé de plus de 75 ans ;
5° Sauf dispense accordée par le garde des sceaux, ministre de la justice, ne pas être conjoint, concubin, parent ou allié jusqu’au degré d’oncle ou de neveu inclusivement d’un magistrat ou d’un fonctionnaire de la juridiction ou lié avec l’un d’entre eux par un pacte civil de solidarité.
Le Médiateur ou le délégué du procureur de la République appelé à se voir confier des missions concernant des mineurs doit en outre s’être signalé par l’intérêt qu’il porte aux questions de l’enfance.
Lorsqu’une association envisage une modification de la liste mentionnée au 7° de l’article R. 15-33-32 ou de désigner, pour accomplir les missions confiées à l’association, une personne physique n’ayant pas été personnellement habilitée, elle doit en aviser le procureur de la République. Ce dernier lui indique, le cas échéant, les personnes qui, ne remplissant pas les conditions mentionnées aux alinéas précédents, ne peuvent être autorisées à accomplir les missions confiées à l’association.
Après avoir fait procéder à toutes les diligences qu’il juge utiles, le procureur de la République ou, si l’intéressé doit exercer ses fonctions dans le ressort de la cour d’appel, le procureur général décide de l’habilitation de la personne pour une durée probatoire d’un an.
A l’issue de cette période, le procureur de la République ou le procureur général décide de l’habilitation de la personne pour une période de cinq ans, après avis de l’assemblée générale des magistrats du siège et du parquet du tribunal ou de la cour d’appel, ou de la commission restreinte de l’assemblée générale des magistrats du siège et du parquet dans les juridictions où sa constitution est obligatoire.
L’habilitation est renouvelable pour une même durée selon la même procédure.
Les décisions prévues au présent article précisent si la personne est habilitée comme médiateur ou comme délégué du procureur de la République et si elle est habilitée à se voir confier des missions concernant les mineurs.
La liste des personnes habilitées par le procureur de la République est adressée au procureur général.
L’habilitation peut être retirée si la personne cesse de satisfaire à l’une des conditions prévues par l’article R. 15-33-33 ou si elle n’exécute pas de façon satisfaisante les missions qui lui sont confiées. Ce retrait est prononcé, après que l’intéressé a été mis à même de présenter ses observations orales, selon la procédure prévue par l’article R. 15-33-35 pour la décision d’habilitation.
En cas d’urgence, le procureur de la République ou le procureur général peut retirer provisoirement l’habilitation en attendant de pouvoir procéder aux consultations prévues par le deuxième alinéa de l’article R. 15-33-35.
Dès qu’il est habilité en application des dispositions du premier alinéa de l’article R. 15-33-35, le médiateur ou le délégué du procureur de la République et les personnes morales habilitées prêtent devant le tribunal de grande instance ou devant la cour d’appel le serment suivant :
» Je jure d’exercer mes fonctions avec rigueur, loyauté, impartialité et dignité et de respecter le secret professionnel. » Le serment n’oblige à aucune neutralité qu’ils n’ont pas puisqu’ils sont le « médiateur » ou l’association mandatés par le procureur de la République pour faciliter le règlement amiable d’une infraction pénale. Ce serment n’oblige pas plus à une indépendance qu’ils n’ont pas s’ils sont salariés d’une association.
Comment s’exerce la délégation du Procureur ?
Le Médiateur et le délégué du procureur de la République sont tenus à l’obligation du secret dans les conditions fixées par l’article 226-13 du code pénal.
Le médiateur et le délégué du procureur de la République adressent une fois par an un rapport d’activité au procureur de la République ou, s’ils exercent leurs fonctions dans le ressort de la cour d’appel, au procureur général.
En conclusion, nous sommes loin des principes fondamentaux de la médiation qui sont indépendance (même si ce critère n’est plus imposé depuis la transposition de la directive de 2008 par le décret du 20 janvier 2012), impartialité, neutralité et confidentialité. Sur ce dernier point, la transmission d’un rapport au Procureur démontre bien qu’ils n’ont rien d’indépendant et bafouent en acceptant cette mission de renoncer aux principes mêmes de la médiation.
De la même façon, il est bien évident que le délinquant et la victime ne vont pas en médiation avec la même liberté de consentement. L’un a plus à perdre qu’à gagner tant s’il renonçait à la médiation que s’il l’accepte dans ce cadre ce qu’on lui demande sur délégation du procureur.
Il est même inconcevable s’il l’on est médiateur que l’on accepte une telle mission. Il est également dommage que personne ne constate que dans cette acceptation, il y a une promotion sociale que certains travailleurs sociaux recherchent et disent en être flattés de se voir investis d’une telle charge sans voir qui leur manquent des compétences juridiques notamment pour exercer un pouvoir qui n’est pas anodin sur les justiciables.
Tout au plus, il s’agit de composer avec la sanction pénale mais certainement pas de médiation. Le fait qu’il s’agisse d’une alternative aux poursuites ne justifie pas cette appellation qui doit cesser car elle opère une vraie confusion sur la notion de médiation.